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vendredi 12 juin 2020, par
Mots :
cocasse dodeliner maîtrise(r) ténacité se cabrer
Photo :
Voir plus bas.
Fête de la vache au Châtelard, un dimanche de Pâques. On dit "Comice" quand on est initié.
Je n’y suis pas.
C’est pas mon monde, mais je suis curieux, alors j’y vais.
Canon sous le bras, batterie et carte mémoire de rechange en poche. Il y aura peut-être moyen de réaliser quelques portraits.
En bon citadin pur sucre, je me rends compte d’emblée que je n’ai pas choisi les bonnes chaussures : la vache se fâche, la vache se lâche, la vache tache...et les godasses prennent des moustaches...
Dès l’entrée du site, un grand champ plat, le spectacle est cocasse : une lignée de robinets, de tuyaux d’arrosage, et chacun y conduit sa vache pour la doucher, la tamponner, la dorloter, lui lustrer le poil, lui cirer la corne, quand elle en a, et lui curer le sabot.
Parfois la vache semble apprécier à leur juste valeur les soins prodigués par le maître. Celle-ci dodeline gentiment sa bonne grosse tête de tarine, passe sa langue rose sur son museau humide, roule des regards languides tout à l’entour...
Sa voisine de stalle, elle, rue dans les brancards, refusant tout de go le jet d’eau froide. Elle se cabre et tire comme une damnée sur le licol. Il faut toute la vigueur et la maîtrise du garçon vacher pour la maintenir, et la persuader qu’ici, chacun œuvre pour sa magnificence...
Il faut voir comme ils et elles sont fièr(e)s, tous ceux et toutes celles qui s’occupent de Jalouse, de Jil, de Jarmade ou de Joliette (année en J pour cette première sélection de bêtes à cornes). Ils ne se ménagent pas, ils ne comptent pas les litres de sueur, et la chemise blanche de mise pour le comice prends dès la mi-matinée des teintes que le cotonnier n’avait pas à son catalogue...
Et les Anciens !!!
Il faut voir comme ils sont fiers, les Anciens, comme ils couvent des yeux la jeune génération qui est à la manœuvre. Pour sûr qu’ils s’y retrouvent, il n’y a pas si longtemps, cinquante ou soixante ans tout au plus...une paille.
Le corps cassé par un labeur trop dur, mais l’œil perçant, à l’affût, l’encouragement généreux à la bouche et le geste qui l’accompagne, que l’on devine maintes fois répété.
Il faut voir aussi comme, parmi les jeunes, elles sont remarquables de ténacité, les filles.
Parfois frêles, mais tellement déterminées, elles savent compenser une constitution plus faible que celle des gars, et accomplissent la tâche avec une ruse inouïe.
Quelle belle jeunesse !
Chacune des bêtes appelée sur le devant de la scène est mise en valeur pour son poids, sa taille, le volume de sa lactation, la couleur de sa robe. La speakerine commente avec assurance et encourage le public à applaudir. Chaque vache réagit selon son caractère. Chaque éleveuse, chaque éleveur prends les compliments le sourire aux lèvres. C’est une affaire d’équipe.
Mais la vache, elle, la gagnante ou la perdante, comment réagit elle à ce tohu-bohu, à cette journée de bruit et de tumulte, à cette débauche de décibels et de visiteurs ??
Dom, inquiet...