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vendredi 17 avril 2020, par
Vendredi 17 avril
C’est pas comme si...
C’est pas comme si je me sentais une force de cheval à user. Non, c’est pas comme si...
C’est que je suis en train de casser des noix.
C’est pas comme si je me sentais des envies de bondir, de courir, de suer. Non, c’est pas comme si…
C’est que je suis en train de casser des noix.
C’est pas comme si la couleur du ciel incitait à sauter sur le vélo, dans les baskets. Non, c’est pas comme si…
C’est pas comme si il y avait tout près d’ici des rivières, des prairies, des rochers, des chemins creux, des biquettes, des bisons. Non c’est pas comme si.
C’est que je suis en train de casser des noix.
C’est pas comme si j’avais envie de me précipiter tête la première contre les murs. Non, c’est pas comme si…
C’est que je suis en train de casser les noix.
C’est pas comme s’il n’y avait mille choses à faire, mille choses à changer. Non, c’est pas comme si…
C’est que je suis en train de casser des noix.
C’est pas comme si tout allait de travers. C’est pas comme si le bouchon avait été poussé un peu trop loin.
C’est pas comme si on ne se sentait pas défendus. C’est pas comme si on ne se sentait pas lésés. C’est pas comme si on ne se sentait pas dignement représentés. C’est pas comme si on ne se sentait pas bafoués. C’est pas comme si on ne se sentait pas bernés.
C’est pas comme si on avait entendu des imbécillités sans nom sortir de la bouche d’une porte-parole du gouvernement.
C’est pas comme si une ministre de la santé avait sciemment menti et s’était ensuite défilée face à l’attaque en règle du virus. Pour briguer un poste de maire....qu’elle a magistralement raté.
C’est pas comme si...
C’est pas comme si on avait des politiciens surdiplômés mais dénués de la moindre once de bon sens, qui veillent sur nous, ...et surtout sur eux.
C’est pas comme si le mensonge d’état était devenu une institution.
C’est pas comme si, dans les sphères du pouvoir, chacun tirait la couverture à soi.
C’est pas comme si on avait à notre tête des francs-tireurs(!)qui ne bossent que pour leur compte.
C’est pas comme si on engraissait en batterie, dans les salons cossus des lieux du pouvoir, des générations de fripouilles atteintes de "phobie administrative", de "pertes de mémoire quant à l’étendue et la provenance de leur patrimoine", des obsédés de la branlette, des voleurs reconnus et patentés, des délinquants en col blanc exonérés de taxes, d’impôts, de contribution à l’effort national, et exonérés de honte. C’est pas comme si on connaissait leurs noms.
C’est pas comme si ces types-là fonctionnaient en noyaux, en réseaux, en familles. C’est pas comme s’ils se serraient tous les coudes, ou au pire se tenaient par les couilles.
C’est pas comme s’ils étaient prêts à vendre père et mère, prêts à retourner la veste...toujours du bon côté.
C’est pas comme si on ne nous avait pas bassinés avec le ruissellement qui profiterait évidemment à tous. Les plus riches seraient-ils assez stupides pour ignorer l’existence de la serviette-éponge qui garde l’excédent de liquide ?
C’est pas comme si aujourd’hui on promettait le contraire de ce qu’on promettait hier...et que, sûrement demain, on promettra ce qu’on promettait hier.
C’est pas comme si les matraques des CRS avaient subitement muté en délicats plumets ouatinés pour caresser le minois des soignants qu’on a tabassés à moult reprises l’année dernière.
C’est pas comme si des gazeuses avaient été commandées au lieu de respirateurs.
C’est pas comme si le policier disposait de bottes, de gants, de protèges tibias, de casque, de visière, de carapace, de bouclier, d’armes diverses alors qu’il faut faire appel à des dons de Décathlon pour que l’infirmière ne risque pas sa peau 10 fois par jour.
Voilà. Je cassais gentiment des noix, et me voilà furax.
Remonté comme un coucou, me dira encore A, suiveuse attentive de mes délires confinés.